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6 avril 2012 5 06 /04 /avril /2012 15:28

société

 

“Le monde qui vient aura la langue

que produiront nos objets”

Le murmure du vieil homme

  

           Ces adultes, ces jeunes gens addictes à leur jouet numérique seraient-ils, à leur insu, les mercenaires dociles d’un capitalisme avide qui leur dicte leurs gestes, leur souffle leurs choix ?”. Il y a de la lucidité dans le regard du vieil homme qui se surprend à murmurer ces mots. A les proférer au spectacle de l’engouement que manifestent les humains qui s’engouffrent, comme un seul homme, dans la voie de la Croissance.

            A tout prix, et par tous les moyens, il faut croître. La Croissance est l’unique salut. Tel est le mot de l’idéologie dominante. Il convient par conséquent de travailler plus, plus rapidement, et dans la vie plus longtemps. L’enjeu est de produire et de consommer plus et par là, pour les uns : de produire plus d’argent ; pour les autres : améliorer le bien-être matériel et moral des populations. L’erreur étant de croire, non sans ingénuité, que les deux finalités, la monétaire et l’éthique, se recouvrent.

            Dans les années 80 un instrument performant, l’ordinateur, est commercialisé avec le succès que l’on sait. L’entreprise qui s’en équipe augmente sa rentabilité. Le capital qui vend l’instrument se fait un monceau d’argent. Pour l’économie, l’objectif est atteint. C’est du côté du salariat que s’observent les dégâts collatéraux. Les employés travaillent-ils moins, de façon plus calme, en étant mieux rémunérés ? La réponse est négative. Le dommage le plus sévère, quant à lui, est donné par le chiffre du chômage. Le chômage engendré par l’usage de l’ordinateur.

            Il n’est nullement établi, songe le vieil homme, que l’adoption généralisée de l’ordinateur ait été, globalement, un bienfait pour l’humanité. Pourtant, c’est à cette jauge que devrait être évalué (autant qu’il est possible) le bien fondé de l’introduction d’une technologie nouvelle dans le champ du social. Un objet nouveau fait-il son apparition ? –Combien de licenciements ? Quelle conséquence pour la geste collective ? Le néo-capitalisme ne s’inscrit pas dans ce questionnement.

            La croissance, l’ubris du toujours plus, la croissance infinie constitue sa ligne directrice. Multiplier la quantité de marchandise et le nombre des consommateurs en sautant la frontière des nations, ceci afin de faire du chiffre, définit sa mission, sa raison d’exister. Certes, étant donné l’énergie qu’il génère, nulle autre économie n’a comme lui la vertu de susciter la recherche, l’invention et l’innovation. Ceci en raison de la liberté d’initiative qu’il favorise dans l’espace et le jeu de la concurrence. Mais il le fait en aveugle. Sans considérations politique ou éthique. En matière d’anthropologie, le capitalisme libéral est sans tête. Il ne voit pas qu’il épuise la Terre. Que les ressources naturelles se mettent à manquer. Que les déchets des villes deviennent des montagnes. Qu’il commence à faire chaud. Que les peuples entre eux se montrent de plus en plus hostiles. Que les humains se sentent placés sous le regard des drones. Qu’ils redoutent de voir proliférer parmi eux des clones et des cyborgs.

            Ceci seulement pour faire savoir, lecteur, ce qu’un vieil homme a en tête lorsqu’il refuse au Capital, qui le lui offre gracieusement, et même avec tendresse, un téléphone portable.

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