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24 février 2014 1 24 /02 /février /2014 08:27

Littérature

 

Margaret Drabble

“Un bébé d’or pur”

Christian Bourgois Editeur, 2014

 

            J’ai ri une première fois, en lisant cet ouvrage, page 188. Margaret Drabble citait Proust. Et c’était drôle. Un jeune écrivain se vantait d’avoir publié deux choses. D’abord : “un livre traitant de l’infini sur la rive occidentale du lac Victoria-Nyanza.” Ensuite : “une monographie sur le fusil à répétition dans l’armée bulgare”. Proust est un auteur comique, on l’oublie trop souvent. Son propos m’avait remonté le moral. J’y puisais l’énergie de pousser ma lecture jusqu’à la page 280. Un bond qui me fit parcourir le meilleur de l’ouvrage. Je me mis à rire, là, pour la seconde fois : “Papy était mort, nous annonçait-on, mais il avait vécu suffisamment pour entrer dans l’ère du portable”. Cette apogée d’une vie humaine m’enchantait. Elle déclencha en moi, sans doute par mimétisme, l’envie d’une performance. Celle de lire en son entier, au risque d’un ennui mortel : “Un bébé d’or pur” gros de 400 pages. Par simple mimétisme ? Pas tout à fait. Je voulais savoir. Savoir ce qui arrive à ce bébé en or lorsqu’il grandit et devient vieux. N’était-ce pas la promesse du livre ? Celle-ci exprimée d’abord dans le titre. Puis annoncée clairement page 231 dans le corps du texte : Nos petits-enfants, qu’advient-il d’eux ? Ils entreprennent un long voyage avec tant d’innocence”.

            L’expression “pure golden baby” désigne en anglais ces enfants gracieux dont on découvre que l’intelligence ne s’est pas entièrement développée. Dont on observe, singulièrement, qu’elle échoue dans l’apprentissage de la lecture. Cliniquement, ces jeunes sujets ne sont ni des enfants malades, ni des enfants trisomiques. Ce sont des enfants en bonne santé mais “simplets”. Que deviennent-ils une fois adolescents, quand ils parviennent à l’âge adulte ou même atteignent le 3ème âge ? Et qu’en est-il de la vie de leur entourage ? Le lecteur concerné par cette question, laquelle interroge un cas particulier de la condition humaine, se montrera déçu, voire abusé, en constatant que ce sujet ne constitue en aucune façon l’objet central du livre. Explorer avec prudence et empathie l'univers intime d'un être singulier, grâce aux antennes de l'imagination, est bien ce que l'on peut attendre d'une oeuvre romanesque. A travers le personnage de la petite Anna et celui de Jessica, sa jeune mère, Margaret Drabble nous livre sans doute certaines indications sur l’être et l’existence de leur couple. Mais non seulement nous demeurons sur le seuil de leur vie intérieure, surtout celle de l’enfant, mais encore le récit s’arrête au milieu du voyage. Le sujet est ailleurs. Et l’ouvrage est hybride. Présenté comme un roman, s’agit-il d’un roman ? On songe plutôt aux notes d’un journal, à la chronique nostalgique et romancée d’un milieu intellectuel d’une époque. Le milieu universitaire de l’ethnologie et de la psychiatrie, en Angleterre, dans les années 60 et 70. Dépourvue de mouvement, la temporalité du texte est relativement immobile. Ça bouillonne à petit feu dans le chaudron. Hélas, trompés sur le menu, il ne nous est pas beaucoup donné d’avoir faim. Carla, toutefois, qui vécut au Royaume-Uni dans ces années là, à la lecture de ce potage trouva quelque saveur. Margaret Drabble étant par ailleurs, croit-elle se souvenir, une bonne romancière.

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