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15 février 2014 6 15 /02 /février /2014 09:37

Religion

 

Vous dormez Domitille ?

 

          J’ai rencontré Domitille. Elle est la jeune femme dont je fais plus haut l’éloge. Et aussi un peu la critique au sujet d’une carte de vœux de Noël, dans les tons pastel, que je reçus d’elle. Cette femme aux cheveux de vent est une personne avec qui on peut échanger sur tout. Sur presque tout. A cœur ouvert, l’un écoutant l’autre, nous avons parlé religion. Ai-je clairement laissé voir, évoquant l’Eglise catholique, le point de vue précis d’où je l’observe ? Je crains que non. J’adresse à Domitille, pour réparer ce flou, la note que l’on va lire. Elle intéressera, je le sais, quelques uns d’entre vous, mes très chers lecteurs.

            Mes réserves concernant l’Eglise catholique ne portent pas sur le fait de la foi. Le fait que ses fidèles croient, fut-ce à l’encontre de toute raison, à la divinité de l’homme Jésus. La plupart des humains, pour survivre, doivent se soutenir d’une croyance. Celle-ci fût-elle athée comme se trouve être la mienne. L’évaluation qu’il m’est donné de faire de l’Eglise et de ses fidèles n’a pas d’autre critère que la conformité à l’évangile. L’évangile d’une main, donc, l’Eglise de l’autre. L’Eglise du moins à travers les signes qu’elle diffuse. Ce qui  dès lors saute aux yeux est le constat d’un détournement. Constat que bien d’autres assurément ont fait avant moi. De grands saints d’abord, et ensuite la Réforme. Le détournement est celui que font l’Eglise et ses fidèles d’une part fondamentale du message de Jésus. (En gros Jésus pardonne. N’exclut pas –sauf les riches. Accorde la priorité absolue aux pauvres. L’Eglise, de son côté, culpabilise. Excommunie. Condamne l’homosexualité, la masturbation, l’infidélité conjugale, l’adultère, le divorce, la contraception, l’avortement, le nouveau mariage, l’euthanasie consentie… Qui la délivrera de cette confusion temporelle de la morale et de la foi ? Comme si le “royaume de Dieu” était de ce monde). Sur le plan politique, en revanche, elle autorise la propriété privée et consent aujourd’hui à l’usure. L’Eglise donc promeut une politique. Une politique issue à l’origine de la société où elle est née. Celle-ci fondée sur le modèle de la société patriarcale. Elle en garde le rêve. Mais elle dut, à travers l’Histoire et tant bien que mal, épouser son temps. Observez-la aujourd’hui. Elle évolue avec dextérité sur les réseaux électroniques que lui imposa le mercantilisme américain devenu mondial. Elle joue le jeu de la société néo-libérale.

Le drame est qu’elle ne peut pas faire autrement. La vie évangélique comme telle (“Les oiseaux du ciel…” etc) n’est pas viable longtemps. Il y a une utopie dans l’évangile de Jésus. Et les tendres chrétiens ont bien été obligés de ne pas lire et de ne pas entendre le message évangélique dans son entier et dans sa radicalité. Cet aveuglement inévitable a fait des chrétiens, je le regrette mais je dois le dire : des innocents. Des personnes qui ne sont pas, quoi qu’elles le croient et quoi qu’elles fassent, du côté des pauvres. Des personnes qui ne mesurent pas, en toute candeur, la portée non évangélique de leurs choix, de leurs ambitions, de leurs actes petits et grands. Ils ne voient pas. Ils ne voient pas les pensées qu’ils inspirent. La violence qu’à leur insu ils propagent. Qu’ils inspirent à qui ? Aux pauvres, précisément. A ceux qui ne possèdent rien, et tant auraient besoin d’espérer pour survivre. Que les chrétiens dans leur innocence soient obstacle au message de Jésus, ils ne le voient pas. Très sincèrement (est-ce montrer trop de compréhension que de l’affirmer ?) ils ne le voient pas. Ne se voient pas. Se contemplent avec complaisance dans le miroir de la bonne société, mais ne se réfléchissent pas dans le miroir de l’évangile. Aussi ne devrait-on pas nourrir à leur endroit trop de sévérité. En tous cas beaucoup moins, et avec beaucoup moins de violence que n’en manifestait Jésus à l’égard des pharisiens. (Lesquels, je présume, se trouvaient dans une situation un peu analogue.) A mes yeux, si je résume, l’Eglise chrétienne est à l’évangile ce que l’industrie est à la science. Ou ce que l’économie libérale est à la Déclaration des Droits de l’Homme. A savoir l’exploitation temporelle (en grande partie non consciente) d’une haute pensée. Pour l’Eglise, à des fins de consolation personnelle, et au profit d’intérêts familiaux, matériels et sociétaux. L’Eglise en somme est  un milieu social clos mais prospère, où l’on porte au cou l’évangile comme une amulette. Ainsi m’apparaît-elle, autant qu’il m’est donné de l’apercevoir, sachant qu’à l’approcher de plus près pourrait se découvrir Emmaüs, les Sans-Abris, et les Restaurants du Cœur. Vous dormez, Domitille ?

- Ne vous réveillez pas.

 

P.S. : Aurait-on lu au-dessus de mon épaule ? Un mouvement d’évangélisation de type nouveau se fait jour dans l’Eglise. Ce mouvement préconise l’exercice d’une pastorale dite “d’engendrement”. Entendez : de “réengendrement à la vie spirituelle”, voire à la vie tout court. Ceci dans le cadre de groupes de paroles et de lecture collective de l’évangile. Permettant à chaque participant de suivre et de méditer le pas à pas de la prédication de Jésus lui-même. De sorte que, s’identifiant aux personnages que Jésus rencontre et guérit (“Va, ta foi t’a sauvée”) chacun puisse entendre personnellement la bonne nouvelle. La révélation du fait qu’il est singulièrement désiré et aimé.  Que la vie, de ce fait, vaut la peine d’être vécue. (Jésus, fils du Créateur, assurerait  de la sorte le service après-vente de la vie. Il faut dire qu’il en a bien besoin).

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