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3 août 2014 7 03 /08 /août /2014 10:37

Littérature

Guy de Maupassant

“Contes et Nouvelles”

Folio Gallimard

 

            J’ai tout fait dans la vie. Excepté deux ou trois choses. J’ai tout fait de ce que j’ai un jour désiré. Un peu. J’ai tiré au fusil de guerre. C’était sur des cibles en carton. J’ai tiré au canon. C’était à blanc, avec mon papa, sur les flancs du mont Cassion, dans les hauts de Damas, en Syrie. Rassurez-vous, je ne vais pas vous raconter le parcours de ma vie. Sachez seulement qu’un jour, à l’âge de 20 ans, j’ai fait l’élection d’un programme de lecture. “Au cours de ma vie, ai-je décidé, je lirai les grandes œuvres de l’humanité.”. J’ai réalisé ce programme. Un peu. Il y des œuvres, sans doute, que je ne lirai jamais. “Les vies parallèles des hommes illustres”, de Plutarque, par exemple. Ou les “Upanisad” (Le Traité des équivalences). Ni même, à tort : “Les aventures d’Harry Potter”.

            Où en suis-je, à présent, de ce grand projet, demandez-vous ? J’en suis à lire Guy de Maupassant. Les contes et les nouvelles. Trouvés à quatre pattes dans le rayon du bas de la bibliothèque. Je n’avais de cet auteur qu’une connaissance rudimentaire. Bien sûr, j’avais lu “Le Horla”. Mais je n’avais approché l’œuvre qu’à travers la lecture que nous avait donné, à Lyon, dans les années soixante, Gérard Guillaumat. J’avais apprécié l’art du comédien. Médiocrement la teneur des récits. Une certaine vulgarité m’avait rebuté. Intituler un conte “Ce cochon de Morin” ; ou cet autre “Boule de suif” (désignant une dame gentille un peu rondelette), cela chez moi ne passait pas. Dans ces années là, faut-il dire, je lisais avec ravissement “La princesse de Clèves”. Gros malin, ironisais-je à mes dépens, c’est précisément la façon dont se parlent les gens de la campagne et des petites villes de Normandie, sous Napoléon III, et à l’époque de l’occupation prussienne. Avec “Une vieille maîtresse”, de Barbey d’Aurevilly, à propos de laquelle j’ai papoté plus haut, le roman aristocratique jette ses derniers feux. Surgissent Victor Hugo, Flaubert, Sand, Zola. La vie du petit peuple et de la petite bourgeoisie devient l’objet privilégié de la littérature, tout comme de la peinture. Les contes de Maupassant ne sont pas des contes de fées. On les dit “contes” pour la seule raison qu’ils sont plus courts que des nouvelles. Ils ne font guère appel au merveilleux. Ils relatent des faits divers retouchés, habilement mis en scène afin de captiver le lecteur. Et ce lecteur, je vous l’assure, ils le captivent, et même le déniaisent. Car le récit, qui chaque fois laisse songeur, ne s’achève jamais comme l’on pourrait le supposer. De façon inattendue les valeurs basculent. Là ou l’on croyait voir apparaître le bien, le mal se manifeste, et inversement. Un renversement particulièrement typique dans le conte intitulé “Aux champs”. Pas de notations morales, pas de commentaires philosophiques. Les actes, les paroles, le contexte économique et social parlent d’eux-mêmes. Constituent la “matière à réflexion” proposée à l’intelligence du lecteur. Un ton très moderne. De sorte qu’en visionnant “Elena”, le très beau film russe d’Andréï Zuyagintev, diffusé récemment à la télévision, nous n’avons cessé, Carla et moi, de penser aux contes de Maupassant. De la bel ouvrage.

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